La Vengeance du Marquis de Sade

On peut dire [sans se tromper] que Donatien Alphonse François de Sade haïssait Aix-en-Provence. « Le sieur Sade » dit la sentence « aura sur l’échafaud la tête tranchée et le valet, sur une potence, sera pendu et étranglé ». Dans les faits, c’est le 12 septembre 1772 et en effigie que les coupables seront exécutés.

Un article écrit sur la base d’un article de Jean-Pierre Casselys.

Marquis de Sade — La Vengeance du Marquis de Sade

L’histoire débute par un problème d’argent obligeant le Marquis à partir pour Marseille afin de toucher une lettre de crédit. En pleine déprime et n’ayant pas encore Canal+ [chaîne fabuleuse pour dégorger ses humeurs], il se devait d’oublier le virtuel et se contenter du réel. Rentre alors son fidèle Latour [les valets sont toujours fidèles] auquel il demande de lui préparer rapidement « un plan cul ».

C’est le 25 juin 1772, au troisième étage du 15 bis de la rue d’Aubagne à Marseille [à quelques numéros des immeubles qui ce sont effondrés dernièrement (ndlr)], que se déroule la partie fine. Au programme, 4 filles publiques : Mariette Borely, née à Valensole, 23 ans ; Marianne Laverne, lyonnaise, 18 ans ; Marianette Laugier, de la ville d’Aix, 20 ans ; Rose Coste, née dans le Rouergue, 20 ans. Dès son arrivée, le Marquis sort de sa poche des pastilles aphrodisiaques à la cantharide qu’il demande aux filles d’avaler.

C’est là que tout se gâte ; pour avoir absorbé trop de pilules, l’une des jeunes femmes se croit empoisonnée et porte plainte auprès de la Police pour : flagellation reçue et infligée, futution [possession charnelle], pédication [coït anal], sodomie et empoisonnement. [aïe… pauvre enfant]

Le 3 septembre 1772, le procureur du roi à Marseille prononce la sentence. Le Marquis et son valet seront exécutés, après avoir fait amende honorable devant la cathédrale. Prévenu à temps, il s’enfuira en Italie déguisé en curé.

Sade ne pardonnera jamais à Aix de l’avoir condamné. Il se vengera par écrit de celui qui le condamna : le Président Fontanis. Il écrira pour cela le fameux texte du « Président mystifié » : « C’est une espèce de bête […] rigoriste par état, minutieux, crédule, entêté, vain, poltron, bavard et stupide par caractère, tendu comme un oison dans sa contenance, grasseyant comme Polichinelle, communément efflanqué, long, mince et puant comme un cadavre […] Au-dessus de la taille grêle, et même un peu voûtée […], on apercevait chez M. de Fontanis un occiput étroit, peu bas, fort élevé par le haut, décoré d’un front jaune que couvrait magistralement une perruque à plusieurs circonstances, dont on n’avait point encore vu de modèle à Paris; deux jambes un peu torses soutenaient avec assez d’appareil cet ambulant clocher, de la poitrine duquel s’exhalait, non sans quelques inconvénients pour les voisins, une voix glapissante, débitant avec emphase de longs compliments moitié français, moitié provençaux, dont il ne manquait jamais de sourire lui-même avec une telle ouverture de bouche que l’on apercevait alors jusqu’à la luette un gouffre noirâtre, dépouillé de dents, excorié en différents endroits […] Indépendamment de ces attraits physiques, M. de Fontanis avait des prétentions au bel esprit […] Une seule classe d’individus avait des droits sur l’âme cuirassée de M. de Fontanis, c’était celle des catins ».

Cette haine d’Aix, le Marquis l’évoque encore 15 ans après avoir échappé au billot : « Quant à Aix, ce “bourbier d’Aix”, elle est la ville de l’échafaud toujours dressé par des marchands de thon accidentellement vêtus d’une jaquette, dont pas un seul ne sait seulement le français ».

Sources : L’article original de Jean-Pierre Casselys

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